MENNONITES

MENNONITES
MENNONITES

Les «assemblées» mennonites tiennent leur nom de Menno Simons (1496-1561); ce prêtre frison se convertit, en 1536, à l’anabaptisme pacifique dans une de ses versions néerlandaises proche de l’anabaptisme pacifique suisse né à Zurich en 1525. Il devint l’un des chefs et le réformateur de ce courant religieux, en Hollande et jusqu’en Allemagne. Son influence s’étendit en fait, excepté la branche dite houttérienne, à l’ensemble de l’anabaptisme pacifique européen, qui, cantonné dans des communautés rurales et caractérisé par son pacifisme, par son refus de l’engagement social, par sa farouche défense du primat des groupes locaux, a connu, principalement au XIXe siècle, une importante émigration vers l’Amérique du Nord.

L’anabaptisme pacifique suisse

L’anabaptisme pacifique est né à Zurich, au début de 1525, d’une scission entre Zwingli et certains de ses disciples au moment de l’introduction de la Réforme dans la cité et dans le canton. Les disciples impatients, parmi lesquels il faut citer Conrad Grebel et Felix Mantz, désiraient la rupture du lien entre l’Église et l’État. Leur conception était celle d’une Église de convertis, opposant le Corpus Christi au Corpus christianum de la chrétienté médiévale. Elle trouva son expression symbolique dans le baptême des seuls adultes sur profession de leur foi, d’où le nom de re-baptiseurs («anabaptistes») donné au groupe, puisque tous ses membres avaient déjà été baptisés enfants. Les intéressés refusaient quant à eux toute valeur à ce premier «baptême» et repoussaient l’épithète qu’on leur imposait, de façon d’ailleurs péjorative. Entre eux, ils s’appelaient «frères» et l’habitude a subsisté de désigner les anabaptistes pacifiques suisses par le vocable de «frères suisses». Un strict refus de la mondanité, de l’usage de la force et des fonctions politiques ainsi qu’une nette insistance sur l’indépendance des groupes locaux, ou assemblées, caractérisaient ces dissidents. De Suisse, leur foi fut introduite en Allemagne du Sud, puis dans les terres des Habsbourg. Partout, le mouvement rencontra un succès certain, et dans toutes les classes sociales, spécialement chez les clercs et les intellectuels humanistes. Il semble avoir aussi attiré quelques personnes qui avaient participé aux mouvements révolutionnaires de Thomas Müntzer et du «royaume de Münster» ou à celui, pacifique, de Melchior Hofman.

Menno Simons et les mennonites

La persécution s’abattit vite sur le mouvement zurichois et sur l’anabaptisme suisse et non suisse. Elle fut particulièrement ressentie en Hollande, où les anabaptismes hofmanien et de type münstérien étaient assez répandus. Les pacifiques souffrirent d’être confondus avec les autres, tandis que certains de ces derniers tendaient au pacifisme, après l’échec des chiliastes militants. Menno Simons, après avoir adhéré à l’anabaptisme pacifique, en devint peu à peu l’un des chefs principaux en Hollande et dans l’Allemagne rhénane et septentrionale. Il réorganisa les communautés hésitantes et son influence réformatrice se fit sentir jusqu’en Suisse. Après sa mort, tous les anabaptistes pacifiques, à l’exception de ceux de la branche communautaire dite houttérienne, se rallièrent plus ou moins à ses principes et reçurent tous progressivement le nom de mennonites. Menno marqua l’ensemble des communautés par son radicalisme en matière de pureté de l’assemblée et par le rôle prééminent qu’il accordait aux ministres du culte. Fruit d’une conjoncture sociale, la réorganisation mennonite des assemblées fut contestée, dès le XVIIe siècle, en Hollande même, par suite des changements sociaux propres à ce pays (tolérance religieuse, participation des mennonites à la vie sociale, etc.). Désormais, le mennonitisme hollandais connut un sort à part, acceptant la culture globale et participant aux courants théologiques les moins conservateurs. Le reste des communautés mennonites était formé, jusqu’à la fin du XIXe siècle et au début du XXe, d’une majorité de cultivateurs, dont la réputation de progressisme agricole est encore bien vivante. Mais, dans ces communautés rurales physiquement isolées de la société globale, la «non-mondanité» prit des aspects de formalisme, vestimentaire ou autre, tandis que l’expression des croyances et le culte se sclérosaient sous la direction d’anciens sans culture théologique. À la fin du XIXe siècle et au début du XXe, un réveil d’inspiration piétiste-revivaliste a donné à l’anabaptisme pacifique un nouveau départ, éventuellement prosélytique et même missionnaire. Cependant, les Hollandais demeurent, dans l’ensemble, en marge de ce mouvement, par leurs tendances libérales en théologie. Un retour aux sources historiques de l’anabaptisme du XVIe siècle est également amorcé.

Migrations mennonites

Pacifistes, les mennonites refusent, en théorie, de porter les armes et de prêter serment. Combinée avec d’autres traits culturels et sous l’influence d’autres facteurs, cette attitude les a obligés à de nombreuses migrations. Au XVIIe siècle, certains d’entre eux allèrent se fixer en Russie. Mais leur déplacement le plus important a eu lieu, dès les XVIIe et XVIIIe siècles, et surtout au XIXe, vers l’Amérique du Nord (Canada et États-Unis). Actuellement, près d’un tiers de leurs effectifs (environ 230 000 sur près de 645 000 en 1980) habitent cette partie du monde. Ils y sont groupés en un certain nombre de «conférences» plus ou moins conservatrices, en particulier pour ce qui est des formes de la non-mondanité. On y rencontre les mennonites les plus résolument conservateurs, les amish , qui refusent toute forme de contacts, même ecclésiastiques, avec les autres mennonites. Leur habillement particulier a été popularisé par la photographie. D’autres mennonites moins conservateurs, d’origine russe, ont retenu l’attention des observateurs par leurs méthodes de colonisation agricole et les formes de leur vie sociale.

En 1980 et à la suite d’efforts missionnaires en provenance d’Europe, mais surtout d’Amérique du Nord, il existait plus de 90 000 mennonites africains, et près de 95 000 en Asie. L’Europe et l’U.R.S.S. en comptaient 95 500 (2 000 environ en France).

Les mennonites, persécutés, puis vivant volontairement à l’écart du monde, ont surtout, dans l’histoire, une réputation de grande honnêteté, de souci du travail bien fait, de progressisme agricole, de charité agissante et d’hospitalité généreuse. La recherche actuelle tend à leur reconnaître un rôle particulier dans l’expérimentation des formes de vie en commun qui ont abouti, par des cheminements divers, au coopératisme.

Encyclopédie Universelle. 2012.

Игры ⚽ Нужна курсовая?

Regardez d'autres dictionnaires:

  • Mennonites — • A Protestant denomination of Europe and America which arose in Switzerland in the sixteenth century and derived its name from Menno Simons, its leader in Holland Catholic Encyclopedia. Kevin Knight. 2006. Mennonites     Mennonites …   Catholic encyclopedia

  • Mennonites — Mennonitisme Sous catégorie Évangélisme Et articles connexes Le credo symbole …   Wikipédia en Français

  • Mennonites —    The Mennonites emerged in the 1540s to consolidate and carry on the tradition of the Swiss Brethren and the first generation of Anabaptists. The movement had been rocked by the martyrdom of most of its founders, the failed revolt led by Thomas …   Encyclopedia of Protestantism

  • MENNONITES —    essentially CONSERVATIVE and usually EVANGELICAL CHRISTIANS descended from the ANABAPTIST movement of the sixteenth century. In recent years some MENNONITES have claimed an ethnic identity apart from religious BELIEFS. The movement owes its… …   Concise dictionary of Religion

  • Mennonites in Mexico — Mennonite family in Cuauhtémoc. Total population 80,000[1] Regions with significant populations …   Wikipedia

  • Mennonites in Belize — Mennonite children selling peanuts to tourists near Lamanai in Belize. Total population 10,865 Ethnic Mennonites of European extraction and 793 Mennonites from other ethnic groups[1] …   Wikipedia

  • Mennonites in Paraguay — Mennonite children in San Juan Bautista. Total population 82,710 (1987)[1] Regions with significant populations …   Wikipedia

  • Mennonites in Bolivia — Total population 28,567 (1995)[1] Regions with significant populations Santa Cruz Religions Anab …   Wikipedia

  • Mennonites in France — The Mennonites in France are religious descendents of the Anabaptist movement. Anabaptists first appeared in the east of France during the early years of the Protestant Reformation. Strasbourg was a haven for all kinds of religious dissidents… …   Wikipedia

  • Mennonites —    See Anabaptists …   Historical Dictionary of the Netherlands

Share the article and excerpts

Direct link
Do a right-click on the link above
and select “Copy Link”